septembre 2007, 3ème série de plâtre edf...

Et c'est reparti!

18 septembre, au petit matin, arrivée à l'hôpital en salle de plâtre...

Juliette est revétue de 3 jerzey et un sur la tête, une vraie poupée...

Elle s'encourage en chantant, elle appréhende: le cadre, les poulies, les sangles... la traction.

Alysson, 12 ans, 75 degrés, passe avant: scoliose de l'adolescence, à opérer dans 6 mois, on l'attache, elle en a marre, elle pose des questions sur la minerve plâtrée qu'elle va avoir. Pauvre jeune fille, pas facile tout ça à cet âge non plus.

Juliette regarde, elle sait que ça va être son tour. On l'attache sur le cadre, sangle pour "tirer" les pieds, sangle sous le menton puis le moment le pire, on tire, on tire, on tire... 10 kg de traction, la machoire serrée par la sangle, elle pleure. Elle se laisse faire, elle ne se débat pas, elle est sage comme une image ma fille, mais elle pleure. C'est pire que si elle se débattait, elle pleure en silence, elle avale ses larmes les yeux fixés sur moi. Mes yeux brillent, je ne pleure pas, je tiens sa main, je l'embrasse, je ne craque pas. Je n'ai pas le droit, je tiens pour elle...

Les kinés, Xavier et Jean Pierre sont adorables, le chirurgien, comme à son habitude,  l'encourage avec douceur. Derrière la porte un père pressé s'impatiente et hurle qu'il attend depuis longtemps, il y en a du monde aujourd'hui encore (des rachis, des pieds bots...).

On commence les bandes platrées, ils essayent de faire patienter juju en la faisant rire, ils restent concentrés sur leur tâche avec chaque enfant, c'est physique, c'est manuel, c'est psychologique aussi ces métiers, ils le font avec leurs mains et avec beaucoup de coeur.

Le plâtre sèche, on met la résine, on fait les découpes. On rhabille juliette, 2 tailles au dessus, la pression retombe, le moral aussi. Dans un mois on recommence, puis 1 mois après encore.

Trois plâtres pour trois mois, ça veut dire trois tractions.

On remonte en fauteuil roulant, tous épuisés, dans la chambre 225. Mon ange s'endort un peu...

On est trois dans la chambre. Il y a Paul, 6 ans qui a eu un accident de vélo lui provoquant une plaie à la cheville et Louis, 3 mois, opéré pour rétablir la sensibilité de son bras suite à un accouchement difficile. On échange nos bobos entre mamans.

Il y a  une petite fille, chambre 217, plâtrée pour la première fois, notre chirurgien m'a demandé de passer la voir pour la rassurer et répondre aux questions de ses parents, juju est une "habituée". On se rencontre, on papotte, on rit un peu.

Les enfants jouent ensemble.

Retour dans la chambre puis départ à la radio: le stress: on était à 56 degrés environ, sous corset... Après la traction, quelle sera le résultat? On ne le saura pas forcément aujourd'hui, tout dépend du monde a qu'il y a, chacun fait au mieux, la tâche n'est pas facile.

Cette fois-ci, on saura: 36 degrés sous edf (c'est beaucoup mais c'est mieux).

On va passer une nuit blanche sur un fauteuil entre mamans, les enfants font ce qu'ils peuvent pour dormir, ce n'est pas chez eux, ils sont génés par les plâtres, les douleurs... Les infirmières passent avec un mot gentil pour chacun, merci à elles. Elles ont beaucoup de mérite, elles sont aux petits soins malgré le petit effectif de nuit. On dort (on fait semblant), c'est long.

Petit matin, tout le monde s'active.

On repart en salle de plâtre, Jean Pierre fidèle au poste fait les dernières découpes.

Alysson n'a pas dormi, le plâtre lui provoque des douleurs jusque dans la machoire. Je tente de l'encourager, je comprends, je crois.

On repartira toutes à la maison, nous les mamans des enfants edf de la veille, aux quatre coins de la France. Louis rentre aussi, un peu de kiné et tout ira bien, ça sera un mauvais souvenir. Paul doit rester pour une greffe de peau encore 10 jours. Alysson sera opérée dans 6 mois, elle revient le mois prochain pour retirer le plâtre et faire un moulage de corset. ma petite puce de l'Aveyron reviendra aussi dans un mois pour faire un milwaukee et nous... On saute dans le bus où pour une fois quelqu'un se lève , chargées comme des touristes, pour récupérer Baptiste qui a dormi chez mamie.

Papa est au travail, il n'a pas dormi non plus, il ne peut s'absenter à chaque fois, il était là au moment essentiel. On rentre de chez mamie en taxi, je suis livide, vidée.

Je fais manger mes anges, je range tout, je passe un coup d'aspirateur, c'est ma transition hôpital-maison!

Et je plonge sous une douche brulante pour me défaire de toutes ces ôdeurs d'hôpital, je reste une heure, voire plus, le téléphone sonne plusieurs fois, je n'ai plus la force de répondre, de raconter, je suis  épuisée, j'ai tout donné.

Juliette s'écroule sur le canapé.

Je stresse déjà pour les douches, les chutes, les vêtements à prévoir... Et on en est qu'au début.

Je maudis ceux qui pensent que ce n'est rien. Je remercie ceux qui prennent des nouvelles, écoutent et compâtissent.

Papa rentre, on mange, puis j'écris ces mots pour extérioriser...

Je vais aller dormir avec une pensée amicale pour tous ceux que j'ai croisé à l'hôpital et en pensant déjà au prochain rendez-vous, à l'organisation de ces journées mouvementées où il faut tout prévoir et préparer d'avance.

Bonne nuit mes anges... Bonne nuit à tous...